La médiation animale facilite le contact, rassure et permet souvent de débloquer certaines situations compliquées dans le parcours de soins et la prise en charge en EHPAD. Audrey Wargnier, aide-soignante et zoothérapeute, nous parle de son quotidien auprès des personnes âgées, qu’elle a choisi d’accompagner avec deux chiens, des lapins et un cochon d’Inde.
Audrey Warnier se consacre depuis dix ans aux personnes âgées. A la recherche d’un métier dans l’humain et la proximité, elle suit une formation d’aide-soignante et entreprend son stage au sein du CHU de Reims en unité psychogériatique spécialisée dans les démences de type Alzheimer. C’est là qu’elle “tombe amoureuse” de l’accompagnement de la personne âgée. “Lorsque l’on travaille dans l’humain, on a la chance de vivre des expériences qui changent tous les jours. On est près du patient et de la famille,” confie Audrey.
C’est en effet au sein de ce service et auprès d’un chef de projet tourné vers les thérapies non médicamenteuses qu’elle découvre de nouveaux outils de communication et de soins pour ralentir notamment les effets de la maladie d’Alzheimer, comme l’humour dans le soin et la médiation animale, une méthode qui l’interpelle particulièrement. Elle crée ainsi son entreprise indépendante de médiation animale et zoothérapie mais n’abandonne pas pour autant son métier d’aide soignante qu’elle exerce aujourd’hui chez LNA Santé.
Animation en EHPAD : les animaux au centre des ateliers
L’animation en EHPAD est essentielle au bien-être des résidents. Elle fait d’ailleurs partie des prestations que les établissements sont tenus de proposer. Si Audrey nous rappelle que les EHPAD sont avant tout “des lieux de vie”, elle nous donne un aperçu des ateliers qu’elle mène auprès des résidents, accompagnée de Crespin le lapin, Rainbow le Golden et Hope la petite chienne croisée. “En animation de groupe, les animaux permettent surtout d’éveiller l’attention, d’évoquer des thèmes de débat, de créer du lien, de prévoir des moments récréatifs. Les résidents se prennent souvent très volontiers au jeu.”
Mais la médiation animale en EHPAD est loin de s’arrêter à l’animation. Elle joue également un rôle important dans le cadre des soins et des thérapies non médicamenteuses.
La médiation animale pour gérer les troubles du comportement et faciliter les soins
En tant qu’aide-soignante, Audrey connaît bien les difficultés que l’on peut rencontrer dans le cadre de son travail comme des refus de soins, la gestion de troubles du comportement chez des personnes atteintes d’Alzheimer ou une intégration difficile pour un nouveau résident. Là encore, les animaux sont d’un grand secours pour accompagner les professionnels, débloquer des situations de crise et créer des sentiments positifs chez les personnes. Audrey intervient particulièrement au sein des unités de vie protégée (UVP) spécialisées dans l’accueil des personnes atteintes d’Alzheimer ou de troubles apparentés. “Un monsieur en unité protégé avait peur de sortir. On a donc laissé sortir le chien et l’on a dit à la personne qu’il fallait vite aller le chercher. Petit à petit, le résident est parti à sa recherche et n’avait plus peur de sortir.”
Des anecdotes de ce type, Audrey en a beaucoup. Tous les jours, ses petits protégés sont d’une aide inestimable auprès des personnes âgées ou malades. Le refus de soins est une situation connue des aides-soignants et souvent difficile à gérer. Mais lorsque le résident fait la toilette du chien, il comprend ensuite plus facilement et parfois même de lui-même qu’il doit s’occuper aussi de lui. Il trouve une nouvelle motivation aux gestes d’hygiène quotidienne, il a envie de s’arranger pour sortir promener le chien et trouve un but positif à sa journée.
Les animaux pour préserver l’autonomie
Motricité fine, stimulation cognitive, exercices physiques, promenades sont autant de bienfaits que les animaux peuvent aussi apporter aux seniors. Lorsqu’un patient n’a pas l’envie ou la force d’aller faire un peu d’exercice dehors pour préserver sa santé et son autonomie, il est beaucoup plus enclin à le faire s’il s’agit de promener le chien. Il est davantage motivé et la promenade prend subitement davantage de sens. Audrey sait habilement gérer les situations pour mettre ses animaux à contribution de manière optimale. “Lorsque l’on vient pour faire des soins, c’est un peu pénible et embêtant, mais si l’on arrive avec des animaux on devient beaucoup plus intéressant, on crée l’attraction.” Elle est même parvenue à faire sortir de sa chambre un nouveau résident réfractaire qui a été attiré par la présence des animaux. La médiation est ensuite beaucoup plus aisée.
S’occuper d’un animal aide également les personnes âgées à travailler leurs propres capacités physiques et cognitives. Lancer la balle au chien, le promener, le brosser, lui faire sa toilette sont autant d’activités motivantes pour faire les efforts escomptés. “En lui demandant de brosser le chien tous les jours, on a permis à une dame qui s’était cassé le bras de faire sa rééducation plus facilement”, raconte Audrey.
Si l’animal ne fait qu’accompagner le thérapeute, il est cependant d’une grande aide. Vecteur de sentiments, d’affections et d’émotions, il est aussi fidèle et sincère. Il n’émet aucun jugement et sert de tremplin au thérapeute. Audrey explique qu’elle adapte chacune de ses séances aux besoins du patient, même si elle laisse une grande place à la spontanéité véhiculée par la présence de l’animal. Son bagage d’aide-soignante en gérontologie et son expérience auprès des personnes atteintes d’Alzheimer lui permettent de mieux cerner la problématique de chaque situation et de chercher l’origine du trouble. Elle intervient aussi souvent avec ses animaux pour accompagner des personnes en fin de vie.
Concernant la nouvelle loi pour l’autorisation des animaux en EHPAD, elle est évidemment favorable à cette initiative, tout en rappelant qu’il ne faut pas oublier que cela exigera certains aménagements pour permettre la présence des animaux dans des conditions optimales.
Humanitude, zoothérapie, le monde de la gérontologie se tourne de plus en plus vers une approche nouvelle des soins qui redonne sa place à l’humain. Même si les soins sont indispensables, ce que personne ne nie, ils ne sont pas une fin en soi. La lutte contre l’âgisme décrié par nombre de professionnels aujourd’hui passe sans aucun doute par ces méthodes empathiques et humaines qui nous montrent qu’une personne âgée existe, conserve ses envies et sa personnalité, au-delà des besoins liés à la dépendance ou à la maladie.
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