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On découvre un nouveau rôle de la dopamine sur la mémoire

Si, en EHPAD, on fait tout pour préserver les fonctions cognitives des résidents par le jeu et les activités ludiques, ce n’est pas sans raison. On connaît déjà le rôle clé de la dopamine pour le stockage de l’information et la mémoire à long terme. Une nouvelle étude publiée dans le revue scientifique Nature Communications montre l’implication de la fameuse “molécule du plaisir” dans l’apprentissage et la mémorisation de nouvelles informations.

Apprendre par le chant, le jeu ou toute autre activité ludique. Ces méthodes sont souvent utilisées dans le domaine de l’éducation spécialisée ou auprès des personnes âgées. Cependant, rares sont les preuves scientifiques qui permettent d’expliquer le lien entre le plaisir éprouvé et les informations sélectionnées par la mémoire pour y être intégrées. Les travaux menés par Lionel Dahan, maître de conférences en neurosciences à l’université Toulouse III – Paul Sabatier et au Centre de recherches sur la cognition animale (CRCA/CBI – CNRS/UT3) ont été regroupés dans l’étude publiée le 21 mai 2024 dans la revue scientifique Nature Communications. Cette étude apporte un nouvel éclairage sur le rôle clé que joue la dopamine dans les mécanismes de mémorisation. 

La mémoire conserve les éléments les plus “pertinents”

Afin de comprendre l’enjeu de cette nouvelle étude, il est important de revenir sur les mécanismes essentiels de l’apprentissage et du fonctionnement de la mémoire. Si l’on se souvient plus facilement de certains éléments que d’autres ce n’est pas un hasard. Ce choix est très personnel et intentionnel. Face au même flux d’informations, deux personnes aux capacités identiques ne se souviendront pas forcément des mêmes données. Ceci s’explique par le fait que le cerveau ne pouvant stocker l’ensemble des informations qu’on lui soumet effectue un tri sur ce qu’il juge “important” de conserver. Cette sélection est réalisée en collaboration étroite avec les émotions. On se souvient plus facilement des événements plaisants que des expériences désagréables ou jugées “sans intérêt”. Les neurosciences sont en mesure d’expliquer scientifiquement cette sélection par des mécanismes complexes concernant les processus d’apprentissage et les connexions neuronales. 

A quoi sert la dopamine ?

La dopamine est un neurotransmetteur important du cerveau qui joue plusieurs rôles essentiels dans le fonctionnement de l’organisme et le comportement. Il joue d’abord un rôle dans le contrôle et la coordination des mouvements. D’ailleurs, une diminution de la dopamine dans certaines parties du cerveau due à la maladie de Parkinson est associée à d’importants troubles moteurs. Par ailleurs, la dopamine est impliquée dans diverses fonctions cognitives, y compris la mémoire, l’attention et l’apprentissage. Elle aide à moduler la transmission des signaux entre les neurones, ce qui est crucial pour le traitement de l’information. La régulation de l’humeur et des émotions passent par la dopamine qui est libérée lors de comportements agréables, contribuant à la sensation de bien-être. Elle joue également un rôle clé dans le système de récompense du cerveau, influençant la motivation et la recherche de récompenses. Elle nous pousse à répéter des comportements qui procurent du plaisir ou sont bénéfiques, ce qui explique qu’elle puisse être également impliquée dans les mécanismes de dépendance et les comportements addictifs. On lui attribue aussi une fonction de régulation du sommeil et des cycles circadiens veille-sommeil, en affectant la vigilance et la capacité à rester éveillé.

La dopamine peut initier et renforcer les processus de mémorisation

Jusque-là, on connaissait le rôle de la dopamine sur les phénomènes de mémoire à long terme et de conservation des souvenirs qui poussent à “filtrer” les informations stockées pour retenir uniquement les plus “pertinentes”, à savoir les plus plaisantes. On ignorait cependant que les neurones dopaminergiques pouvaient initier les mécanismes de mémorisation.

Cette nouvelle étude montre comment la dopamine permet de sélectionner les événements à mémoriser. 

En effet, si les mécanismes décrivant la capacité des neurones à modifier leurs interconnexions en fonction de l’expérience au sein de l’hippocampe pour permettre l’apprentissage et la mémoire avaient bien été décrits par les neurosciences, on ne connaissait pas encore l’élément qui permettait de sélectionner les éléments à mémoriser. Les travaux menés par Lionel Dahan démontrent qu’il s’agit précisément de la dopamine et que ce sont les neurones à dopamine qui se trouvent à l’origine de la formation de la mémoire.

Cette étude a été pratiquée sur des souris, chez qui on a activé les neurones dopaminergiques dans une région du cerveau appelée l’aire tegmentale ventrale (VTA). Cette activation a eu pour effet de renforcer les interconnections des neurones de l’hippocampe lors d’un processus essentiel à la mémorisation et à l’apprentissage de nouveaux environnements. Au contraire, l’inhibition de ces neurones a eu pour conséquence de freiner l’apprentissage et l’acquisition de nouvelles informations. 

Les résultats de cette étude représentent une véritable avancée concernant le rôle essentiel de la dopamine dans les processus de mémorisation, d’apprentissage et de formation des souvenirs. Si l’on connaissait l’importance de la dopamine pour maintenir les mécanismes de potentialisation à long terme (PLT) de la mémoire, à savoir, l’augmentation importante et durable de l’efficacité synaptique lors de la mise en mémoire d’un souvenir, on ignorait le fait que la dopamine est également à l’origine de ces mécanismes. 

Le rôle clé de la dopamine mis à jour dans les processus complexes de la formation des souvenirs pourrait apporter de nouveaux éclaircissements dans le traitement et la prise en charge de certaines maladies neurodégénératives comme Alzheimer ou Parkinson. Par ailleurs, on comprend mieux l’importance des activités agréables et plaisantes dans le processus d’apprentissage et de mémorisation. 

Sources : Nature Communications / Futura Sciences

Sophie B.

Rédactrice, journaliste presse et web passionnée de lettres et de belles lettres, Sophie dispose d’une grande expérience dans le domaine de la rédaction. A la recherche de la satisfaction des lecteurs, Sophie s’attache à la clarté du sens autant qu’à la beauté du verbe. Un diplôme de Sciences Politiques tout comme une formation d’enseignante lui permettent d’allier justesse, dynamisme et rigueur au service d’un contenu unique et recherché. Elle part sans cesse à la recherche de la réalité du terrain. Ses investigations auprès des publics concernés et les interviews qu’elle mène avec professionnalisme rendent son contenu vivant et instructif. Depuis plusieurs années, Sophie met sa plume et son expertise au service des seniors, afin d’approfondir de manière claire et rigoureuse les thématiques qui les touchent de près.

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