Encore méconnue du grand public et souvent confondue avec la maladie d’Alzheimer ou de Parkinson, la maladie à corps de Lewy comporte pourtant certaines spécificités qu’il est important de connaître pour une prise en charge adaptée et un accompagnement optimal des malades et des familles. Catherine Laborde, qui s’est éteinte le 28 janvier dernier, a mené un long combat contre cette maladie et surtout contre la méconnaissance de ses particularités.
Marraine de l’Association des Aidants et Malades à corps de Lewy (A2MCL), Catherine Laborde s’est éteinte le 28 janvier dernier, date on ne peut plus symbolique marquée par la journée mondiale de la maladie à corps de Lewy. Elle avait l’habitude de témoigner et de parler ouvertement de ses symptômes et de sa lutte quotidienne, afin de faire connaître la maladie à corps de Lewy et d’aider la société à progresser vers une meilleure compréhension de cette pathologie. Cette maladie peu connue en effet est pourtant la deuxième démence neurodégénérative la plus fréquente après Alzheimer. On estime qu’elle concerne près de 200 000 personnes en France mais que de nombreux cas ne sont pas diagnostiqués. Avec certains symptômes similaires à ceux d’Alzheimer et de Parkinson, la maladie à corps de Lewy est souvent confondue avec ces pathologies et difficile à diagnostiquer. Une prise en charge spécifique est pourtant nécessaire.
Qu’est-ce que la maladie à corps de Lewy ?
La maladie à corps de Lewy, appelée également démence à corps de Lewy (DCL) est une pathologie neurodégénérative qui touche plusieurs zones du cerveau. A l’origine de symptômes multiples et complexes, elle affecte considérablement les capacités motrices et cognitives des patients. La cause de cette dégénérescence des neurones est l’accumulation anormale de la protéine alpha-synucléine. Ce sont ces agrégats que l’on nomme les “corps de Lewy”, du nom du neurologue, le Dr. Friederich Heinrich Lewy, qui a été le premier à décrire ces structures. Les corps de Lewy se répandent dans tout le cerveau et surtout au niveau du cortex principal. Il s’agit de l’une des caractéristiques principales de la maladie à corps de Lewy et aussi de l’une des différences essentielles avec la maladie de Parkinson où les corps de Lewy sont généralement localisés uniquement dans le tronc cérébral responsable du contrôle des mouvements. Les causes de la maladie à corps de Lewy restent méconnues. Les risques génétiques paraissent très faibles et il ne s’agit pas d’une maladie héréditaire. Elle se déclare généralement après 50 ans et, dans de rares cas, auparavant. On estime que la durée de vie d’une personne atteinte de la maladie à corps de Lewy peut varier de 2 à 20 ans, avec une moyenne d’environ 7 ans.
Quels sont les symptômes de la maladie à corps de Lewy ?
Les symptômes de la maladie à corps de Lewy ressemblent à ceux d’Alzheimer et de Parkinson mais avec plusieurs particularités.
Même si les symptômes et surtout la chronologie de leur apparition peut varier d’une personne à l’autre, on regroupe 4 catégories de symptômes, les symptômes cardinaux de la maladie à corps de Lewy :
- Les troubles cognitifs : troubles de l’attention et de l’orientation, des difficultés à verbaliser et à réaliser certaines tâches simples. Notons que c’est surtout une grande fluctuation dans les troubles cognitifs qui est révélatrice de la maladie à corps de Lewy.
- Des symptômes moteurs “parkinsoniens”.
- Des hallucinations, essentiellement visuelles
- Une forme de somnambulisme durant le sommeil paradoxal.
Les différentes formes que peuvent prendre ces symptômes et leur ressemblance avec les pathologies de Parkinson et d’Alzheimer rendent compliqué le diagnostic de la maladie à corps de Lewy. Cependant, des critères précis d’évaluation, les critères de diagnostic clinique de McKeith, apportent un éclaircissement sur la particularité des symptômes de la maladie à corps de Lewy.
Quelle prise en charge pour les personnes atteintes de la maladie à corps de Lewy?
Bien que la maladie à corps de Lewy soit incurable à l’heure actuelle et qu’il n’existe pas encore de solution pour stopper la dégénérescence, des traitements et une prise en charge adaptée permettent d’atténuer ou de ralentir l’apparition des symptômes et de mieux vivre avec la maladie. Il s’agit principalement d’inhibiteurs de l’acétylcholinestérase.
Poser le bon diagnostic pour la maladie à corps de Lewy reste un enjeu essentiel pour sa prise en charge. En effet, la confondre avec la maladie d’Alzheimer ou de Parkinson peut avoir des implications, parfois graves, pour le patient, comme l’administration de neuroleptiques pour calmer des troubles importants du comportement et qui peuvent parfois avoir un effet destructeur sur des personnes atteintes de la maladie à corps de Lewy. “Il est urgent de mieux diagnostiquer la maladie à corps de Lewy, de mieux la connaitre pour mieux la traiter. Il est urgent de nous soutenir, nous, les 180 000 malades et nos aidants. Il est urgent de soutenir l’Association des Aidants et Malades à corps de Lewy,” témoignait Catherine Laborde dans une vidéo postée sur le site de l’Association.
Les aidants et les professionnels qui interviennent à domicile et en Ehpad doivent aussi pouvoir bénéficier de formations sur la gestion des symptômes et des troubles du comportement des malades, souvent caractérisés par une grande instabilité. Il est important d’adopter les bonnes réactions, de savoir faire preuve de beaucoup d’empathie et de compréhension afin de calmer l’anxiété et l’hypersensibilité qui caractérisent souvent les personnes atteintes de cette maladie. Une réaction inadaptée, au contraire, peut accentuer les troubles du comportement et même déclencher de l’agressivité de leur part.
Une personne atteinte de la maladie à corps de Lewy peut-elle rester vivre à domicile ?
La question du maintien à domicile en cas de maladies particulièrement invalidantes et difficiles à gérer comme Alzheimer ou la maladie à corps de Lewy est souvent dépendante de plusieurs paramètres qui doivent être étudiés au cas par cas. Il est important avant tout d’évaluer les capacités de l’aidant à supporter et à gérer les troubles du comportement de son proche, particulièrement la nuit lors des crises de somnambulisme durant lesquelles le malade peut se sentir persécuté. La santé de l’aidant doit aussi pouvoir être préservée. Il faut également évaluer les aides possibles et le budget disponible pour les mettre en place. Une grande fluctuation dans le comportement des malades qui peuvent passer très rapidement d’un état à l’autre est souvent très difficile à gérer pour les aidants et il est essentiel de bénéficier d’un accompagnement quotidien et d’un soutien de professionnels qualifiés.
Si l’on envisage une entrée en Ehpad pour notre proche, il est possible d’en discuter avec lui et de prendre le temps d’en considérer les différents aspects. Notons en effet que même à un stade avancé, les personnes atteintes de la maladie à corps de Lewy conservent souvent une grande lucidité. Il ne faut pas hésiter à intégrer la personne dans le processus de décision et le choix de l’établissement, afin de faciliter plus tard son intégration et de diminuer la culpabilité de l’aidant.
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